Retour sur Broadway - Acte 3, scène 2 : Trahir

Première version :
https://soundcloud.com/witold-bolik/trahir-comment-jai-conquis

Trahir - Où le narrateur retourne sa veste, constate que contrairement à celle de Gainsbourg elle n'est pas doublée de vison, du coup la reretourne puis se dit finalement qu'il fait assez beau pour s'en passer et se décide à l'enlever.

N'écoutez pas ce que disent les sous-titres, c'est n'importe quoi. Les sous-titres en gras nous mentent. Sus aux sous-titres !

Bref. Tout ça pour dire que je ne sais par où commencer. C'est une scène très complexe. Il y a même du jeu d'acteur avec une espèce de voix off, un monologue intérieur de A et B à la fois : comme c'est précisément du jeu d'acteurs, et que j'en suis un des plus mauvais, j'ai dans la dernière version réduit la réplique à deux syllabes : "qu'un leurre" (qui fait bien sûr écho à "ça n'était..." de la scène précédente, dont il brise d'un coup l'élan exalté, je rougis pour vous d'avoir à le rappeler).

Après, c'est l'idée qu'on ne peut pas changer ni évoluer sans trahir. Trahir des préjugés, trahir des positions de principes, pour en adopter d'autres qu'on trahira plus tard, etc, c'est une vision qui se défend (je ne dispose même pas des moyens philosophiques pour développer plus que ça : est-ce que c'est "Positiviste", est-ce que c'est "Progressiste", est-ce que c'est "Pragmatique" ? Je ne sais pas, c'est de la Pop, je suis zikos tsé, je suis un peu bête). C'est quand il s'agit de trahir une personne en particulier, de trahir une relation, que le point de vue qui paraissait aller de soi pose un dilemme moral. Trahir des idées qui ne sont plus adaptées à notre vécu paraît sensé, sinon nécessaire à terme ; me trahir moi quand je me montre décevant, ou décider consciemment de trahir quelqu'un qui me déçoit, c'est autre chose. Exaltation donnait le point de vue contraire sur la ville par rapport à Lamentation. Trahir développe Choisir.

En fait, je disais au début que A et B n'étaient que des concepts et pas des personnages, mais, si l'interprète fait bien son boulot, deux actes et demi les ont fait devenir des personnages. Et qu'ils en viennent à vouloir se trahir l'un l'autre pour mieux progresser chacun de leur côté est censé toucher l'auditeur, si, si.

Et, ce que je signifie lourdement dans la version radio en criant hystériquement "alerte acmé", le revirement de situation avec le rappel mélodique (en plus grave, ralenti, hésitant) de la scène 3 du premier acte - La Rencontre, je vous avais dit que c'était ma préférée - est donc censé dénouer toute cette tension. Quand je l'ai joué en public, Zoé, 8 ans, m'a demandé : "Pourquoi ils peuvent pas" ? La vraie réponse est : "Parce que l'auteur est purée de fleur bleue et aime les histoires qui finissent bien, même tirées par les cheveux". L'officielle est celle-ci : A et B repensent à leur rencontre, se rendent compte qu'ils sont devenus des personnages, une entité, qu'ils sont dans l'incapacité morale de se trahir l'un l'autre, et donc qu'ils conquerront Broadway ensemble. Pur mélodrame. Si si. On est passé très près d'une fin tragique, où A et B se déchirent pour obtenir leur propre succès, mais ouf, grâce à leurs scrupules, c'est le collectif qui gagne. D'où le "On" du titre de l'acte. Ce qui "nous" mène tout droit au triomphe.

On note que dans la version 2015, je trahis de 6 secondes la contrainte minutaire. Désolé. Je l'aime lente, celle-ci.

version 2015 :
https://witoldbolik.bandcamp.com/track/acte-3-on-sappelle-wb-sc-ne-2-trahir

livret :

Sur la corde raide. Ad hoc. 

2 - "Trahir" 

La réponse à "Qu'est-ce que ça n'était ?" est donc : "Qu'un engouement passager". Happés par les charmes de la grande ville et aveuglés par leur soif de réussite, B et A entament chacun dans leur coin une sympathique (quoiqu'un brin cynique) ode à la trahison. In extremis, le souvenir de leur rencontre leur fait réaliser que leur attachement profond, etc. 

A/B : ... Qu'un leurre. 

B - Trahir ses illusions n'est pas une mauvaise chose 
Trahir ses déceptions c'est voir la vie en rose 
Trahir ses préjugés c'est le début d'autre chose 
Et trahir A est pour moi un choix qui s'impose 

A - Trahir ses illusions n'est pas une mauvaise chose 
Trahir ses déceptions c'est voir la vie en rose 
Trahir ses préjugés c'est le début d'autre chose 
et trahir B est un choix qui pour moi s'impose ! 

(Aperçoit B) - Tiens, te voilà, toi ! Tu ne voulais pas nous trahir quand même ? 

A et B : - Non... Je ne peux pas...


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