Retour sur Broadway - Acte 2, récitatif n°2 : "Ça a l'air bien"

Ça a l'air bien - Où le narrateur retrouve un brin de volubilité

première version : https://soundcloud.com/witold-bolik/second-r-citatif-a-a-lair-bien

Musicalement, il y a dans l'opéra quatre chansons dont la musique est en plus ou moins grande partie improvisée : on a eu "Choisir" et ses tripatouillages syntaxiques ; celui-ci, qui se contentait au départ de deux accords répétés à volonté, s'est enrichi au fur et à mesure d'espèces d'envolées mélodiques, et en fait désormais partie. C'est le morceau où il y a le plus de texte, et celui qui se rapprocherait le plus à mon avis d'une espèce de spoken word en français. (C'est un morceau très long que celui de Jeffrey Lewis que je mets ici, et dont les non-francophones comme moi devront lire et traduire le texte pour l'apprécier - mais la variation minimale de la mélodie de voix dans cette poussée désarmante dans les aigus vers la fin, c'est de ce genre d'effets que j'essaie de parler, c'est sur ce genre de magie que je louche).



Dépassé par des événements dont il considère qu'on l'a très peu tenu au courant, Chœur Antique nous apparaît dans toute sa vulnérabilité, susceptibilité, et peut-être débilité - je suis habitué au rythme ternaire en prose, c'est un tic, faites pas attention. Volubilité plutôt tiens ! Du côté de l'action, comme je le suggérais plus haut, on ne sait pas si A et B, devenus une entité, sont à la sortie d'un tournant psychédélique qui leur fait délirer toute la suite ou s'ils partent effectivement à Broadway, mais dans les deux cas ils n'ont plus besoin d'un commentateur ou d'un modérateur, mais plutôt de faire taire leur conscience et de se lancer dans l'action. 

"Ça a l'air bien, mais je n'ai pas tout compris" doit être une des phrases que j'ai le plus entendues lorsqu'il m'est venue l'idée saugrenue de me mettre en quête de retours sur ce que je fais. Sa gentillesse désengagée et nonchalante m'a toujours décontenancé, et je suis content de me l'être réappropriée ici.

Chœur Antique se proposait d'être leur Fée Clochette, dans une version sans effet spéciaux ni miniaturisation numérique ni baguette magique : aussi pataud et simple que moi. Mis de côté dans le planning du départ, subtilement démissionné, incertain ni des conditions du trajet ni même de la réalité de leur voyage, il s'en remet à sa destination musicale idéale à lui : le Brésil.

Patrie de la saudade, le "manque habité" disait Barouh je crois, la mélancolie douce et la nostalgie cultivée pour elle-même, pour sa beauté qui nous ferait regretter de retrouver tout ce dont quoi à présent on s'est voué à se languir. Et Jobim, "One note samba", prise par la manche plutôt que "détournée", tout à l'heure, comme un hymne aussi prématuré qu'involontaire de l'opéra et de la vie.

version 2015 - 1
https://witoldbolik.bandcamp.com/track/acte-2-starmanie-d-pressive-r-citatif-n-2-a-a-lair-bien


livret :
 Second récitatif - "Ça a l'air bien"

Chœur antique est dépassé par les évènements. Après une tentative d'analyse, il admet qu'il n'y comprend rien et s'en remet à la musique brésilienne.

Alors là, j'avoue que ça va
un peu vite pour moi.
Ça a l'air bien mais je n'ai pas tout compris.
Que d'ellipses, que d'ellipses !
Remettons à plat tout ça :
C'est la Bérézina en ce début de deuxième acte : tout le monde ne fait que se plaindre (et citer Starmania).
J'arrive et j'essaie d'y mettre le holà mais non,
Ces deux-là ne font que se liguer contre moi pour mieux pleurer ensemble.

Après en douce ils forment un ménage et les voilà partis en voyage.

Alors moi je sers à quoi ?
Comment résumer ce que je ne comprends pas ?

Si personne ne me dit rien, ne me reste qu'à faire
de la samba.



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