Elle ne demandait à tout
instant qu'à exploser d'excitation, s'éreinter en fleurs, des coups à
valdinguer en l'air, des hauts dans le cœur et pâmoisons, palpiter en
brefs éclats illuminés éclatant encore et à nouveau, humer l'extase et
s'en emplir, puis l'éternuer l'extase en brindilles moléculaires
invisibles à l'œil nu, et papillonner l'extase en aventures en fils
brillants magiques secoués par l'air et se faufilant entre les pierres
comme un lézard espiègle - dynamiter le passage terne de sa vie, du
siècle et de la soirée, celui où l'on n'attend même plus la fin.
Neutres et sans incidence furent ses mains quand elles se saisirent des
mains correspondantes de l'être aimé et les jetèrent par la fenêtre
comme pour jouer. "Me voilà bien démuni, je n'ai plus de mains, chérie"
- "Je n'ai rien à te dire, être aimé, prends mon pied dans ta tête" -
"appelons ça une reconstitution" - "certes" - "la reconstitution
d'êtres défaits d'amour" - "de la mécanique appliquée" - "le démontage
méthodique de ton corps, être aimé" - "certes" - " afin d'atteindre le
but" - "quel but ?" - "Un but de recomposition... Par le
démantèlement... sublime... de ton cou, entre autres." - "il faudra
vraisemblablement faire quelque chose à la tête, si tu m'enlèves le
cou." - "J'y veille, j'y veille. Laisse-moi faire. Je n'en suis qu'au
début." - "Certes. Je me sens impatient comme chez le coiffeur. Et quand
m'enlèves-tu cette bouche ? Quand tu m'enlèveras le visage, il faudra
faire quelque chose à cette bouche qui semble peser irrévocable au
centre, a toujours faim et ne se clôt que pour saliver." - "Tu ne peux
pas me faire confiance ? A moi de jouer maintenant."
Les voitures de police américaine se mettent à vriller le bas de la rue, semé d'organes. "Cela doit venir d'en haut." - "Oui, c'est elle." - "Ça ne fait aucun doute." - "Elle mijotait son plan depuis des millénaires." - "Elle est à bout de millénaires." - "Ça ne fait aucun doute. Du troisième étage. En voilà d'autres qui tombent, à intervalles réguliers. J'ai pris des cours d'expression corporelle. Je reconnais bien là ces membres. Vous pouvez noter qu'il y a certains os qui portent tels noms latins, qui sonnent très bien. Il s'agit de clavicules euphoniques. Elles tintent comme de petites clochettes enfantines. Elles se frottent les unes aux autres comme à colin-maillard, et se bousculent, et se chevauchent, c'est parfois indécent comme toutes ces clochettes nues tintinnabulent à travers les nuits, avec leurs jolis pieds qui s'effleurent les uns aux autres à travers toutes les nuits comme celles ci où notre gyrophare veut scintiller, ou après la perte d'espoir il n'y a même plus son manque, où l'on bute immobile, petites figurines et robots ingrats, j'ai pris des cours d'expression corporelle, j'ai acheté un artichaut, je me sens comme plus rien maintenant, je ne sais pas ce que je viens faire à quelle grande nuit vide je dis tout ça pour faire sourire des pavés miroirs maussades et défaits d'eux-mêmes aussi, et qui se creusent et se suspendent et s'agitent par les fenêtres, et se lovent les uns aux autres, et se prodiguent des conseils, et se donnent de l'attention, et se dynamitent en petits morceaux, et se terrorisent en fractions armées, et s'amenuisent en petites coupures, s'amenuisent en petites coupures des nuits entières et leurs suivantes, et s'amenuisent en petites coupures continuellement comme l'éternuement d'extase du troisième étage et qui n'aurait pas de fin, je crois que j'ai besoin d'un congé là, j'ai pris des cours d'expression corporelle, mon métier consiste à, je voudrais trouver belles encore les larmes à venir et mes emmurements, je pense qu'on devrait condamner cette fenêtre qui ne sait plus s'ouvrir, j'ai envie d'être jeune et bête lorsque l'on m'assassine, je me fais ma ciguë tous les quatre matins, je ne vois jamais où je veux en venir, je n'ai qu'une peur qui est celle de m'arrêter, je crois qu'il n'en reste plus rien de ce jouet démantibulé, je crois qu'elle a fait son œuvre et que le temps est avec elle, je sens bien qu'elle est libre et seule dans l'air sauvage des nuits brisées, je la vois bien là tandis qu'elle éparpille les pièces à conviction par la fenêtre du troisième, oh nous tenons notre assassin, je crois que j'ai besoin d'un congé, je ne sais pas comment font les autres pour parler et savoir de quoi, je crois que nous devrions monter, je la vois par là, c'est un germe, elle pullule, elle respire, elle est notre liberté, qui sait, je la vois au bout de l'escalier disperser ses cendres, je la vois comme mourir désemmurée, j'ai besoin d'un congé." - "Oui, allons-y, il faut agir promptement."
Le petit monstre sauvage fit une nouvelle fois craquer ses muscles. Il faut se quitter, souvent, longtemps, et se pincer puis revenir à se défaire, nous sommes faits de multiples couches, comme les wagons, c'est une évidence, tout le monde sait ça, voyons. Il n'y a pas de noyau central. Il n'y a pas de chair sous la peau. Il n'y a pas de peau. Il n'y a là rien à décrire. Il ne s'agit pas de l'absence qui manque à combler d'autres absences, car elle est faite en multiples couches aussi, comme lorsqu'on épluche les arc-en-ciels, c'est incontestable, vous ne pouvez qu'en convenir - il ne s'agit pas d'elle ni non plus d'elle ou de non plus, pas de celui qui s'agit ni de cela qu'on parle. "La voilà, la meurtrière désemmurée, le point de vue d'où elle dégaine les petits bouts d'être aimé, la voilà, nous l'avons, nous la poursuivons, elle nous devance, quelle action, j'ai pris des cours d'expression corporelle, vite vite nous l'avons, l'escalier dérobé, accrochée à son chapeau comme les miraculés par grand vent, les doigts ne nous glisseront pas d'elle, et nous tiendrons notre langage, nous châtierons qui de droit n'est-ce pas, quelle échappée, la voilà l'échappée, à l'impasse acculée, renouvelée, la meurtrière et l'échappée, la sauvage à la grande gueule de vide qui nous ferait prendre de la mémoire pour du passé, or c'est très différent vous savez, j'ai besoin d'un congé, la mémoire c'est donné, le passé c'est une autre affaire, ou le contraire, on ne sait pas, les cours changent, et on épluche et ça irise, et on épluche et ça irise encore, on n'en finit pas d'éplucher, d'iriser pour à la fin pulvériser, je vous jure, on ne peut plus respirer, la voilà la faille ouverte et ses mondes derrière, nous allons les coincer au fond de son regard exagérément clair, comme tracé par un compas dont la pointe aux prunelles aurait percé la toile de fond, un regard mathématique et métallique, nous allons finir par l'avoir cette satanée putain d'imagination !" - "Elle s'ignore, c'est son secret... Elle a fui partout maintenant. Il n'y a pas de lasso pour attraper l'air. Prenons l'autre rue, toutes les rues, prenons-la par toute la ville, nous l'aurons, nous l'aurons ! Jamais ! Encore !". On avait encore jamais vu ça aux mœurs : un vrai sac de nœuds, et d'e-dans-l'o, et de huit renversés. Rien de clair, rien de cerné, rien de perdu ni de retrouvé, à vous laisser vibrant comme le fil tendu des jardins suspendus.
Les voitures de police américaine se mettent à vriller le bas de la rue, semé d'organes. "Cela doit venir d'en haut." - "Oui, c'est elle." - "Ça ne fait aucun doute." - "Elle mijotait son plan depuis des millénaires." - "Elle est à bout de millénaires." - "Ça ne fait aucun doute. Du troisième étage. En voilà d'autres qui tombent, à intervalles réguliers. J'ai pris des cours d'expression corporelle. Je reconnais bien là ces membres. Vous pouvez noter qu'il y a certains os qui portent tels noms latins, qui sonnent très bien. Il s'agit de clavicules euphoniques. Elles tintent comme de petites clochettes enfantines. Elles se frottent les unes aux autres comme à colin-maillard, et se bousculent, et se chevauchent, c'est parfois indécent comme toutes ces clochettes nues tintinnabulent à travers les nuits, avec leurs jolis pieds qui s'effleurent les uns aux autres à travers toutes les nuits comme celles ci où notre gyrophare veut scintiller, ou après la perte d'espoir il n'y a même plus son manque, où l'on bute immobile, petites figurines et robots ingrats, j'ai pris des cours d'expression corporelle, j'ai acheté un artichaut, je me sens comme plus rien maintenant, je ne sais pas ce que je viens faire à quelle grande nuit vide je dis tout ça pour faire sourire des pavés miroirs maussades et défaits d'eux-mêmes aussi, et qui se creusent et se suspendent et s'agitent par les fenêtres, et se lovent les uns aux autres, et se prodiguent des conseils, et se donnent de l'attention, et se dynamitent en petits morceaux, et se terrorisent en fractions armées, et s'amenuisent en petites coupures, s'amenuisent en petites coupures des nuits entières et leurs suivantes, et s'amenuisent en petites coupures continuellement comme l'éternuement d'extase du troisième étage et qui n'aurait pas de fin, je crois que j'ai besoin d'un congé là, j'ai pris des cours d'expression corporelle, mon métier consiste à, je voudrais trouver belles encore les larmes à venir et mes emmurements, je pense qu'on devrait condamner cette fenêtre qui ne sait plus s'ouvrir, j'ai envie d'être jeune et bête lorsque l'on m'assassine, je me fais ma ciguë tous les quatre matins, je ne vois jamais où je veux en venir, je n'ai qu'une peur qui est celle de m'arrêter, je crois qu'il n'en reste plus rien de ce jouet démantibulé, je crois qu'elle a fait son œuvre et que le temps est avec elle, je sens bien qu'elle est libre et seule dans l'air sauvage des nuits brisées, je la vois bien là tandis qu'elle éparpille les pièces à conviction par la fenêtre du troisième, oh nous tenons notre assassin, je crois que j'ai besoin d'un congé, je ne sais pas comment font les autres pour parler et savoir de quoi, je crois que nous devrions monter, je la vois par là, c'est un germe, elle pullule, elle respire, elle est notre liberté, qui sait, je la vois au bout de l'escalier disperser ses cendres, je la vois comme mourir désemmurée, j'ai besoin d'un congé." - "Oui, allons-y, il faut agir promptement."
Le petit monstre sauvage fit une nouvelle fois craquer ses muscles. Il faut se quitter, souvent, longtemps, et se pincer puis revenir à se défaire, nous sommes faits de multiples couches, comme les wagons, c'est une évidence, tout le monde sait ça, voyons. Il n'y a pas de noyau central. Il n'y a pas de chair sous la peau. Il n'y a pas de peau. Il n'y a là rien à décrire. Il ne s'agit pas de l'absence qui manque à combler d'autres absences, car elle est faite en multiples couches aussi, comme lorsqu'on épluche les arc-en-ciels, c'est incontestable, vous ne pouvez qu'en convenir - il ne s'agit pas d'elle ni non plus d'elle ou de non plus, pas de celui qui s'agit ni de cela qu'on parle. "La voilà, la meurtrière désemmurée, le point de vue d'où elle dégaine les petits bouts d'être aimé, la voilà, nous l'avons, nous la poursuivons, elle nous devance, quelle action, j'ai pris des cours d'expression corporelle, vite vite nous l'avons, l'escalier dérobé, accrochée à son chapeau comme les miraculés par grand vent, les doigts ne nous glisseront pas d'elle, et nous tiendrons notre langage, nous châtierons qui de droit n'est-ce pas, quelle échappée, la voilà l'échappée, à l'impasse acculée, renouvelée, la meurtrière et l'échappée, la sauvage à la grande gueule de vide qui nous ferait prendre de la mémoire pour du passé, or c'est très différent vous savez, j'ai besoin d'un congé, la mémoire c'est donné, le passé c'est une autre affaire, ou le contraire, on ne sait pas, les cours changent, et on épluche et ça irise, et on épluche et ça irise encore, on n'en finit pas d'éplucher, d'iriser pour à la fin pulvériser, je vous jure, on ne peut plus respirer, la voilà la faille ouverte et ses mondes derrière, nous allons les coincer au fond de son regard exagérément clair, comme tracé par un compas dont la pointe aux prunelles aurait percé la toile de fond, un regard mathématique et métallique, nous allons finir par l'avoir cette satanée putain d'imagination !" - "Elle s'ignore, c'est son secret... Elle a fui partout maintenant. Il n'y a pas de lasso pour attraper l'air. Prenons l'autre rue, toutes les rues, prenons-la par toute la ville, nous l'aurons, nous l'aurons ! Jamais ! Encore !". On avait encore jamais vu ça aux mœurs : un vrai sac de nœuds, et d'e-dans-l'o, et de huit renversés. Rien de clair, rien de cerné, rien de perdu ni de retrouvé, à vous laisser vibrant comme le fil tendu des jardins suspendus.
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